Au début était le verbe


Edito

Ecrit par Pascal Béria

Le langage est une convention. Il est la condition pour vivre en société, se comprendre, communiquer. Il s’agit même de sa fonction première. Le philosophe Michel Serres qualifie le langage de « ponts doux », par analogie avec les ouvrages d’art qui connectent deux territoires entre eux. Le langage relie, rapproche et permet les échanges. C’est le premier étage de la fusée de la transmission.

Encore faut-il qu’il soit partagé par tous. Ce n’est pas un hasard si c’est par lui que la malédiction Divine s’abat sur les arrogants bâtisseurs de Babel. Sans un langage commun, les hommes sont voués à se déchirer.

« Le langage est source de malentendu », faisait dire Saint-Exupéry à son Petit Prince. S’il est la condition de la compréhension, il est aussi souvent suspecté d’être l’instrument de la domination. Celle des sophistes sur le bas peuple. C’est là son péché originel. Ainsi, quand le politique parle budget, la rue crie au pouvoir d’achat. Lorsque l’Europe appelle à la solidarité, les nations rétorquent souveraineté. Et lorsqu’on ose parler de réchauffement climatique, le citoyen répond libertés individuelles. Chacun parle la même langue, mais pas le même langage. Et de fait, c’est l’individualisme et le grégaire qui l’emportent à la fin.

Le langage commun est la condition de la réussite d’un projet. Pensons au web et à la puissance de son code universel. A celui de la musique et de la peinture. Autant de conventions qui demandent un peu d’effort d’apprentissage, mais qui savent au final transcender ce qui nous sépare. Gageons que des symboles comme la reconstruction de Notre-Dame de Paris puissent nous aider à bâtir ce langage commun. Ils sont autant de ponts doux bien plus solides que tous les murs à ériger. Fussent-ils porteurs.

C’est à cette œuvre de bâtisseurs, celle de la transmission, que nous vous invitons à participer en juillet prochain à Arles. Pas besoin de truelles. Votre bonne humeur et votre curiosité suffiront…

Crédits Image – La Tour de Babel de Pieter Bruegel l’Ancien – ©Wikimedia