Take care


Edito

Ecrit par Pascal Béria

Comment ça va vous ?

On vous pose la question parce que ces dernières semaines ont quand même fondamentalement remis en cause beaucoup de nos convictions. Devant le désarroi assumé des scientifiques et de nos sachants, une valeur qu’on croyait oubliée s’infiltre peu à peu dans le discours ambiant : après le temps de la sidération et de l’attente vient celui de l’humilité.

« Je sais que je ne sais rien » nous disait déjà ce bon vieux Socrate. Je pense qu’on peut tous aujourd’hui prétendre à cet aveu de faiblesse. Nous, on pense que c’est une bonne chose. Le doute, la vulnérabilité, l’impuissance deviennent enfin audibles sur la place publique. Cette reconnaissance nous a accompagnés durant notre période de confinement et dans le soutien aux métiers rendus indispensables. Elle remet désormais au centre des débats la notion de « care ». Un terme rétif à toute tentative de traduction mais avec lequel il va falloir se familiariser.

Le « care » se fonde sur la nécessaire interdépendance des individus permettant d’assurer le bon fonctionnement du monde. Ce sont tous ces gestes d’attention, de service, de sollicitude et de soin dont se nourrissent nos relations interpersonnelles. Dit comme ça, ça sonne un peu comme une de ces « meaningful thoughts » que l’on affiche en salle de réunion. C’est sans doute cet aspect « bon sentiment » qui pèse le plus sur cette notion pourtant complexe. D’une manière générale, le « care » passe pour une activité mineure, déléguée aux femmes dès lors que l’on se situe dans la sphère domestique et aux petits métiers partout ailleurs. Un travail invisibilisé et dévalorisé dans nos sociétés de l’efficacité et de la performance. Le Covid nous a violemment renvoyés nos priorités au visage.

Le « care » est avant tout un modèle de société. C’est une question éthique, sociale, économique. Un objet de militantisme intergénérationnel et égalitaire. Un sujet éminemment politique, donc. A l’heure où les grandes priorités vont être (re)distribuées, où on se questionne sur la résilience de nos modèles de société, on peut se demander si les attributs du « care » auront su se rendre suffisamment indispensables pour s’imposer au « business as usual ». Si l’ère de l’humilité survivra au nécessaire redémarrage de l’économie. La même question se pose pour les sujets écologiques, sociaux et paritaires qui y sont directement connectés.

Pour nous, aux Napoleons, cette indispensable interconnexion des individus est une évidence tant elle est ancrée dans notre raison d’être. Et l’humilité une exigence alors même que nous nous questionnons encore sur les modalités de notre prochaine rencontre. Nous saurons nous souvenir des gestes de sollicitude que vous nous avez témoignés ces dernières semaines et combien ils nous ont été précieux. On peut vous le dire maintenant, vous nous manquez terriblement. Sur cet aveu de faiblesse totalement assumé, on vous dit à très bientôt pour une session estivale pleine de surprises…

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Crédit Image – Wikipedia by AntanO