Welcome to the New Frontier


Edito

Ecrit par Pascal Béria

Au temps de la conquête de l’Ouest américain, les règles étaient simples. Une terre était allouée au premier arrivant. Celui qui décidait de s’installer avait pour usage de marquer son territoire par des entailles faites dans le tronc des arbres ou des petits tas de pierres posés aux limites de ce qu’il estimait être sa propriété. Des signes distinctifs qui suffisaient à officialiser la primauté de sa présence et d’administrer, moyennant le passage d’un agent public, pleinement ses terres. On imagine bien les opérations vigoureuses qui ont, à l’époque, accompagné cette conquête du territoire. C’était le Far-West après tout. La loi fédérale n’apparaîtra que bien après pour y mettre de l’ordre.

On trouve, dans cette histoire de pionniers, beaucoup de l’esprit américain. Le besoin de repousser les frontières, le refus de l’immobilisme, la tendance à vouloir quadriller le territoire pour en fixer les limites du foyer. En 1960, le candidat Kennedy avait repris le concept de « nouvelle frontière » pour marquer sa volonté d’expansion, de progrès des droits civiques et de conquête de l’espace. « I’m asking each of you to be pioneers towards that New Frontier » avait-il déclaré dans son discours d’investiture. Un discours fondateur qui le mènera quelques mois plus tard à la Maison Blanche.

Finalement, la promesse récente du metaverse n’est qu’une continuité naturelle de cette obsession de la nouvelle frontière initiée au XVIIIe siècle. On y retrouve encore la fascination pour les grands espaces libres et surtout l’opportunité pour les pionniers d’y poser des premiers jalons pour chercher à les gouverner. Y placer les petits tas de pierres, histoire de marquer leur territoire. Rien de nouveau, mais l’histoire nous a montré que laisser l’organisation de ces espaces en friche aux mains des seuls pionniers présente des risques conséquents. Et qu’il faut ensuite beaucoup de volonté pour ramener l’ordre à l’ouest du Pecos.

Du 12 au 15 janvier prochains, le sommet des Napoleons aura pour thème « Gouverner ». Cette notion de nouvelle frontière y sera évidemment centrale. Car les promesses de nouveaux espaces cachent parfois des ambitions plus équivoques. Nous tâcherons d’en fixer les limites ensemble et d’explorer les moyens de faire de cette notion une ambition collective. Et des nouveaux territoires des espaces où nous posons des règles qui ne laissent personne sur le bord de la route.

D’ici là, une nouvelle frontière reste à franchir. Celle qui nous sépare de l’année 2022. Nous vous souhaitons donc une excellente fin d’année…